Utiliser l'espace laissé vacant par les bureaux vides pour y installer des logements modulables construits avec des palettes de récupération, c'est l'idée de 6 étudiants toulousains. Dès cet été, 50 logements de ce type devraient voir le jour dans la ville rose et permettre ainsi à des personnes en situation de précarité de retrouver un logement décent.
En 2015, la ville de Toulouse enregistrait 29 000 demandes de logement et 220 000 m2 de bureaux vides. Des chiffres qui mis face à face paraissent faire état d’une situation ubuesque. Pourquoi ne pas utiliser ces locaux pour répondre à la problématique récurrente en France des mal logés? C’est la question que ce sont posés Jaufret, Théo, Baptiste, Mathilde, Valentin et Vincent. La situation des migrants à Calais et l’implantation de campements illégaux dans leur ville leur fait prendre conscience du manque de solutions existantes en France et l’impasse dans lesquelles se retrouvent les mairies. Etudiants à l’ENSA (Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Toulouse) et à l’INSA (Institut National des Sciences Appliquées), ces jeunes réfléchissent alors à une manière d’occuper l’inoccupé. Leur idée : installer des modules d’habitation dans les bureaux vides.
Une solution qui selon eux répond à une double problématique : apporter une nouvelle solution d’hébergement dans un marché saturé et permettre aux propriétaires de bureaux vides de rentabiliser leurs locaux grâce aux gains financiers dégagés par les revenus locatifs obtenus.
Des logements d'urgence en palettes de récupération
En avril 2016, Unity Cube voit donc le jour, c’est le début de l’aventure pour les six étudiants. Constitués en association loi 1901, ils soumettent leur projet à de nombreux professionnels et reçoivent de leur part un accueil très positif. L’obtention de nombreux prix à plusieurs concours les convainc du bien fondé de leur projet et du besoin global de logement à destination des personnes défavorisées.
Construits à partir de palettes de récupération, cette solution d’habitat offre l’énorme avantage d’être modulable et de pouvoir ainsi s'adapter à la typologie du public accueilli. Un bon point quand on sait ce que coûte la transformation de bureaux en logement. Le pari des six jeunes toulousains est de proposer un habitat décent facile et rapide à monter et démonter tout en proposant un rapport qualité/prix très raisonnable estimé à 5 000 euros pour un module couchage de 13 m2, sachant que pour accueillir une famille, la superficie a été estimée à 60 m2.
« L’idée est de proposer différents modules permettant la création de pièces séparées et emboîtables offrant un bon confort d’habitation et une intimité nécessaire à une vie de famille. Ce système permet de s’adapter facilement à toutes les configurations en ne modifiant pas l’espace existant mais en utilisant juste les systèmes de raccordement du bâtiment pour l’eau et l‘électricité » explique Baptiste Debort,l’un des étudiants à l’origine du projet.
Autre avantage non négligeable de ce type d'habitat : son coût peu élevé. Celui-ci s'explique du fait du matériau de base utilisé mais aussi du fait qu‘après démontage tous les matériaux employés sont réutilisables et peuvent donc servir à la construction d’une nouvelle habitation ailleurs, dans d’autres locaux vides. Financièrement, cette solution est aussi économique pour les collectivités partenaires. En moyenne, celles-ci dépensent jusqu'à 50 euros par jour et par personne pour loger un hébergement d'urgence, contre seulement 35 euros pour Unity Cube. Pour les propriétaires des murs, ce nouveau type d’habitat offre selon Baptiste, de vrais plus. « L’occupation de locaux vides leur évite des frais de gardiennage et les préserve du risque de vandalisme et de squatt et donc de dégradation de leur bâtiment. A terme cela peut aussi les exonérer de la taxe dûe au titre de la possession de locaux inoccupés. Pour l’instant, cela ne concerne que Paris, mais ce système de pénalité devrait bientôt être étendu à tout le territoire. Pour ce qui est des garanties destinées à couvrir les éventuels risques de dégradation de leur bâtiment, les propriétaires sont couverts par les assurances ».
Des risques limités donc et des mesures incitatives qui depuis le lancement du projet ont séduit de nombreux acteurs économiques de la région toulousaine au point que ce qui était au départ un travail mené dans le cadre d’un module création d’entreprise de leur école respective est en passe aujourd’hui de déboucher sur un véritable projet entrepreneurial. Grâce à une campagne de crowfounding lancée il y a quelques mois et aux soutiens de plusieurs partenaires financiers qui a permis au total de récolter la somme de 15 000 euros, le projet est aujourd’hui bien avancé. Les premiers habitats devraient voir le jour dès cet été dans la ville rose et permettre à une cinquantaine de personnes de retrouver un logement décent leur permettant ainsi d’échapper à des solutions d’hébergement précaires ou inexistantes. Pour ce qui est de l’avenir, d’autres villes dont Marseille ont d’ores et déjà pris contact avec les membres fondateurs d’Unity Cube pour envisager à leur tour la mise en place de cette nouvelle solution de logements au coeur de leur collectivité territoriale.
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